Le monde de Gouzy http://gouzy.darkentworld.fr/ La Gazette de Gouzy est une « gazette » bimestrielle et gratuite de bande dessinée. Elle est gérée par un collectif autonome qui n'a pas de statut juridique. Elle s'adresse à tou-te-s celles et ceux qui s'interrogent sur notre « société », voire qui œuvrent déjà pour le changement social. La Gazette de Gouzy entend relayer des réflexions, expérimentations et se faire écho de luttes sociales. Elle essaie également de s'inscrire dans une démarche d' « éducation populaire ». À la manière de certains médias alternatifs (comme CQFD), la « gazette » cherche à éviter tout dogmatisme. <br /> <b>Warning</b>: Undefined array key "type" in <b>/homepages/14/d291669841/htdocs/gouzy/site/fluxrss.php</b> on line <b>75</b><br /> Algues vertes : « Si on ne veut plus avoir d'algues vertes, il faut produire moins. Il faut décroître » (Inès Léraud)
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<p style="text-align: justify;"><br /><img src="http://lagazettedegouzy.fr/files/1579296436_1-min.jpg" alt="" /><br /><br /><strong>Les algues vertes tuent&nbsp;! Pas seulement les animaux, au moins 40 ont &eacute;t&eacute; retrouv&eacute;s sur les plages bretonnes, mais aussi les hommes. Le responsable est connu&nbsp;: l&rsquo;hydrog&egrave;ne sulfur&eacute; (H2S) &eacute;manant des algues vertes. Il ne s&rsquo;agit pourtant pas d&rsquo;une fatalit&eacute;. Car si le responsable est connu, le coupable, lui, tente de se d&eacute;rober&nbsp;: une agriculture productiviste dont les pratiques remontent &agrave; la &laquo;&nbsp;modernisation agricole&nbsp;&raquo; des ann&eacute;es 60&nbsp;! L&rsquo; &laquo;&nbsp;histoire interdite&nbsp;&raquo; des algues vertes constitue le c&oelig;ur d&rsquo;une courageuse enqu&ecirc;te dessin&eacute;e, sign&eacute;e de la journaliste In&egrave;s L&eacute;raud et du dessinateur Pierre Van Hove<sup>1</sup>. &Agrave; l&rsquo;occasion de la venue d&rsquo;In&egrave;s L&eacute;raud &agrave; Berrien (29) pour la pr&eacute;sentation de cette Bande Dessin&eacute;e parue en juin 2019, La Gazette de Gouzy a rencontr&eacute; la journaliste. Entretien.</strong><br /><br /><br /><strong><em>La Gazette de Gouzy&nbsp;:</em> Un jour, &agrave; la sortie d&rsquo;une conf&eacute;rence, un homme t&rsquo;a remis un dossier sur &laquo;&nbsp;les morts des algues vertes&nbsp;&raquo;. Ce fut le point de d&eacute;part de ton enqu&ecirc;te. Qu&rsquo;est-ce qui a fait qu&rsquo;&agrave; ce moment l&agrave;, tu as choisi de te consacrer pleinement &agrave; ce sujet&nbsp;?</strong><br /><br /><strong><em>In&egrave;s L&eacute;raud&nbsp;:</em></strong> Moi ce que je trouvais int&eacute;ressant, c&rsquo;est qu&rsquo;&agrave; la diff&eacute;rence des autres dossiers que j&rsquo;avais l&rsquo;habitude de traiter, comme l&rsquo;amiante, la radioactivit&eacute; ou les pesticides, il y avait l&agrave; un ph&eacute;nom&egrave;ne hyper visible d&rsquo;algues vertes. <span style="color: #333333;"><strong>Les effets sur la sant&eacute; des algues vertes ne sont pas diff&eacute;r&eacute;s dans le temps</strong></span>, contrairement aux autres produits toxiques sur lesquels j&rsquo;enqu&ecirc;te, mais sont imm&eacute;diats. Les morts sont retrouv&eacute;s sur les tas d&rsquo;algues vertes. Il y a une situation hyper int&eacute;ressante pour moi&nbsp;: je n&rsquo;ai pas &agrave; trop creuser la question scientifique, alors que d&rsquo;habitude je passe mon temps &agrave; enqu&ecirc;ter sur les rapports scientifiques pour essayer de montrer les liens de causalit&eacute; entre l&rsquo;exposition et la maladie. L&agrave;, je n&rsquo;ai pas &agrave; me prendre la t&ecirc;te sur les questions scientifiques. Tout est l&agrave; et du coup, je vais pouvoir enqu&ecirc;ter sur l&rsquo;aspect politique, sur le discours politique, sur comment, face &agrave; quelque chose d&rsquo;aussi &eacute;norme et &eacute;vident, on peut avoir des r&eacute;actions de d&eacute;ni, de mensonge, sur comment on manipule les foules. <strong><span style="color: #333333;">Ici, le discours politique est clairement mensonger et on peut &eacute;tudier ce mensonge sans avoir &agrave; prouver des choses scientifiques.</span> </strong><br /><br /><strong>Ce qui marque une vraie diff&eacute;rence par rapport &agrave; tes enqu&ecirc;tes pr&eacute;c&eacute;dentes...</strong><br /><br />Dans ce que j&rsquo;avais fait auparavant, il demeurait toujours des doutes scientifiques parce que jamais on ne pourra r&eacute;ellement prouver un lien entre un cancer et une exposition &agrave; un produit chimique chez une personne. On peut le prouver plut&ocirc;t &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle d&rsquo;une population. <br /><br />L&agrave;, pour moi <strong><span style="color: #333333;">c&rsquo;est clairement une enqu&ecirc;te politique</span></strong>. Ce n&rsquo;est plus tellement une enqu&ecirc;te scientifique, parce que tous les acteurs, y compris les scientifiques, sont pris dans des enjeux politiques. Tout est prouv&eacute; depuis tr&egrave;s longtemps et finalement, ces connaissances tardent &agrave; devenir publiques parce qu&rsquo;il y a des int&eacute;r&ecirc;ts politiques et &eacute;conomiques en jeu.<br /><br /><strong>Dans ton enqu&ecirc;te, tu montres bien qu&rsquo;il y a deux tabous. Il y a celui des cons&eacute;quences, avec des &laquo;&nbsp;lanceurs d&rsquo;alerte&nbsp;&raquo; qui ont montr&eacute; que les algues vertes tuent et pas seulement les animaux. Et il y a un tabou plus politique qui est celui des causes, &agrave; savoir les pratiques de l&rsquo;agriculture intensive. Quel a &eacute;t&eacute; le moment fort de ton travail&nbsp;?</strong><br /><br />Le moment vraiment fort pour moi, c&rsquo;est le t&eacute;moignage de l&rsquo;ancien &eacute;lu de la FNSEA, le producteur porcin, qui raconte comment la valeur et la richesse que cr&eacute;ent les agriculteurs sont r&eacute;cup&eacute;r&eacute;es, par qui, comment et <strong><span style="color: #333333;">de quelle mani&egrave;re l&rsquo;argent des subventions, l&rsquo;argent des imp&ocirc;ts et cetera, qui est distribu&eacute; aux agriculteurs via la PAC est finalement ensuite capt&eacute; par quelques grosses familles.</span></strong> Ces transferts d&rsquo;argent, pour moi, c&rsquo;est l&rsquo;aspect qui a &eacute;t&eacute; le plus important et le plus int&eacute;ressant &agrave; &eacute;tudier.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <hr /> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><span style="color: #808080; font-size: large;"><strong>ZOOM : quand la richesse &eacute;chappe aux agriculteurs&nbsp;! </strong></span><br /><br /><span style="color: #808080;"><strong>Comme le souligne In&egrave;s L&eacute;raud dans son enqu&ecirc;te, aujourd&rsquo;hui 99&nbsp;% des agriculteurs se retrouvent captifs de grands groupes industriels (Triskalia, Cooperl&hellip;) qui ont la mainmise sur l&rsquo;ensemble de la cha&icirc;ne de production. De l&rsquo;alimentation pour les animaux, &agrave; la transformation, en passant par l&rsquo;&eacute;levage ou les engrais, rien n&rsquo;&eacute;chappe au contr&ocirc;le de l&rsquo;industrie agro-alimentaire. Comment peut-on se laisser &laquo;&nbsp;pi&eacute;ger&nbsp;&raquo; dans un tel syst&egrave;me, pourrait-on se demander. La logique est implacable&nbsp;: l&rsquo;endettement pousse &agrave; l&rsquo;intensif. Pour s&rsquo;installer, nombre d&rsquo;agriculteurs contractent des emprunts bancaires, souvent exorbitants, et doivent produire de mani&egrave;re intensive pour les rembourser. R&eacute;sultat&nbsp;: comme le souligne In&egrave;s L&eacute;raud, &laquo;&nbsp;les gains de productivit&eacute; sont capt&eacute;s par les dirigeants de l&rsquo;agro-alimentaire, les banques et la grande distribution.&nbsp;&raquo; (p. 103)</strong></span></p> <hr /> <p style="text-align: justify;"><br /><br /><strong>Tu as rencontr&eacute; &eacute;galement Jean-Yves Guillou, un ancien &eacute;leveur laitier intensif de Fouesnant, qui &eacute;tait aussi syndiqu&eacute; &agrave; la FNSEA et qui a fini par remettre en cause cette logique productiviste. Selon lui, &laquo;&nbsp;pour r&eacute;soudre le probl&egrave;me des mar&eacute;es vertes, il faudrait plut&ocirc;t d&eacute;cro&icirc;tre, produire moins.&nbsp;&raquo; Cette rencontre a-t-elle &eacute;t&eacute; un autre moment important&nbsp;?</strong> <br /><br />Pour cet agriculteur, Jean-Yves Guillou, oui en effet, mais tout le monde le dit&nbsp;: <span style="color: #333333;"><strong>si on ne veut plus avoir d&rsquo;algues vertes, il faut produire moins. Il faut d&eacute;cro&icirc;tre.</strong></span> Moi j&rsquo;ai trouv&eacute; le parcours de cet agriculteur int&eacute;ressant parce que le plan algues vertes, qui est un plan &eacute;tatique cens&eacute; r&eacute;duire la quantit&eacute; d&rsquo;algues vertes sur le littoral, a chang&eacute; sa vie mais pas de la mani&egrave;re dont on croit. Lui, il a compris le &laquo;&nbsp;th&eacute;&acirc;tre politique&nbsp;&raquo; en participant aux r&eacute;unions du premier plan algues vertes. Il a finalement d&eacute;cid&eacute; de changer de syst&egrave;me, non pas parce qu&rsquo;il a &eacute;t&eacute; convaincu par ce plan algues vertes mais au contraire, parce qu&rsquo;il s&rsquo;est rendu compte que ce plan n&rsquo;&eacute;tait en fait qu&rsquo;un simulacre et que <strong><span style="color: #333333;">les agriculteurs se faisaient compl&egrave;tement d&eacute;pouill&eacute;s par les industriels, avec la complicit&eacute; de l&rsquo;&Eacute;tat.</span></strong><br /><br /><strong>Est ce-que c&rsquo;est l&rsquo;aspect in&eacute;vitablement anti-productiviste de ton enqu&ecirc;te qui d&eacute;range selon toi&nbsp;?</strong><br /><br />Je ne pense pas parce que les propos anti-productivistes sont hyper courants. M&ecirc;me le conseil d&eacute;partemental tient des propos anti-productivistes. Apr&egrave;s, ce sont des propos qui se diff&eacute;rencient compl&egrave;tement des actes, mais le conseil d&eacute;partemental va dire&nbsp;: &laquo;&nbsp;il faut qu&rsquo;on fasse moins de quantit&eacute; mais plus de qualit&eacute;&nbsp;&raquo;. C&rsquo;est un propos quasi g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;. Non, ce n&rsquo;est pas &ccedil;a ma conclusion. C&rsquo;est plut&ocirc;t la souverainet&eacute; des personnes &agrave; d&eacute;cider de ce qui se passe sur leurs communes et de quelle mani&egrave;re l&rsquo;alimentation peut &ecirc;tre produite. Ce n&rsquo;est pas&nbsp;: productivistes ou pas productivistes. C&rsquo;est davantage, un peu comme on a pu dire pour les populations colonis&eacute;es&nbsp;: <span style="color: #333333;"><strong>il faut le libre arbitre des personnes et des populations, quant au destin de leur territoire.</strong></span> Et c&rsquo;est &ccedil;a que j&rsquo;ai trouv&eacute; int&eacute;ressant, c&rsquo;est qu&rsquo;il y a une sorte de colonisation &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de la France. <span style="color: #333333;"><strong>Les r&eacute;gions rurales de France ont &eacute;t&eacute; trait&eacute;es comme des colonies.</strong></span> C&rsquo;est-&agrave;-dire qu&rsquo;il y a eu une politique &eacute;tatique tr&egrave;s centralis&eacute;e qui a d&eacute;cid&eacute; de leur avenir, sans prendre du tout les d&eacute;cisions en accord avec les populations. Et aujourd&rsquo;hui, on a accultur&eacute; des territoires entiers. Dans l&rsquo;histoire de Jean-Yves Guillou, on voit bien comment il a d&eacute;cid&eacute; de reprendre en main son destin et comment il a d&eacute;cid&eacute; de ne plus se fier ni &agrave; ceux qui, soit-disant, combattent les algues vertes &agrave; travers les plans algues vertes, ni aux industriels pour qui il travaillait. Il a donc enti&egrave;rement repris &agrave; son compte sa production.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><img src="http://lagazettedegouzy.fr/files/1579381490_2.jpg" alt="" /><br /> &copy; Halte aux mar&eacute;es vertes, 2019.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><strong>Quelles sont les cons&eacute;quences de ton enqu&ecirc;te&nbsp;? Peux-tu d&rsquo;ores et d&eacute;j&agrave; en mesurer certains impacts&nbsp;? Au niveau journalistique, par exemple, ton enqu&ecirc;te a-t-elle suscit&eacute; d&rsquo;autres enqu&ecirc;tes sur le sujet&nbsp;?</strong><br /><br />Quand tu vois le travail d&rsquo;&Eacute;lise Lucet par exemple, il y a d&eacute;j&agrave; un gros travail journalistique qui est fait sur le syst&egrave;me agro-alimentaire et pas forc&eacute;ment que breton. En tout cas, cette BD a &eacute;t&eacute; &eacute;norm&eacute;ment relay&eacute;e. La presse nationale en a beaucoup parl&eacute;. Il y a eu deux articles dans Le Monde, deux dans les Inrocks, un dans Grazia&hellip; &Ccedil;a veut donc dire que ce fond est &eacute;norm&eacute;ment relay&eacute; et puis aussi, de mon c&ocirc;t&eacute;, j&rsquo;ai eu beaucoup de retours y compris, pour la premi&egrave;re fois, de journalistes me disant&nbsp;: &laquo;&nbsp;je veux vous parler des pressions que je subis au sein de ma r&eacute;daction locale&nbsp;&raquo;. J&rsquo;ai donc l&rsquo;impression que<span style="color: #333333;"><strong> cela a lib&eacute;r&eacute; une parole &agrave; un niveau que je n&rsquo;avais jamais atteint d&rsquo;habitude &agrave; travers mes enqu&ecirc;tes.</strong></span> Jusque l&agrave;, il y avait en effet toujours des zones de r&eacute;sistance et notamment dans le journalisme o&ugrave; je n&rsquo;avais pas encore eu de t&eacute;moignage de censure et d&rsquo;auto-censure en Bretagne. L&agrave;, j&rsquo;ai re&ccedil;u au contraire beaucoup de retours de journalistes de la presse locale. <br /><br />C&rsquo;est &eacute;tonnant de voir &agrave; quel point la BD circule, &agrave; quel point elle est offerte. Souvent en signature, les gens me disent&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai envie de l&rsquo;offrir &agrave; mon p&egrave;re qui travaille dans l&rsquo;agro-alimentaire&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai envie de l&rsquo;offrir &agrave; ma m&egrave;re qui ne comprend pas les questions &eacute;cologiques et qui ne me croit pas quand je lui dis qu&rsquo;on nous ment&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai envie de l&rsquo;offrir aux &eacute;lus de ma commune&nbsp;&raquo;. Elle sert d&rsquo;argument pour des gens qui essaient de d&eacute;battre avec d&rsquo;autres gens avec lesquels ils sont en d&eacute;saccord. C&rsquo;est &eacute;norme une parole qui se lib&egrave;re. Je vois bien que les gens ont pleins, pleins, pleins d&rsquo;histoires &agrave; raconter sur les algues vertes et je pense que c&rsquo;est tr&egrave;s puissant. <span style="color: #333333;"><strong>C&rsquo;est un moment politique important quand les gens t&eacute;moignent des pressions ou censures qu&rsquo;ils vivent dans leur travail</strong></span> ou bien quand ils prennent conscience de l&rsquo;environnement politique dans lequel ils vivent.<br /><br /><strong>Dans ton enqu&ecirc;te, tu montres bien que ce sont des d&eacute;cennies de &laquo;&nbsp;fabrique du silence&nbsp;&raquo;. Lib&eacute;rer la parole est peut-&ecirc;tre la premi&egrave;re pierre d&rsquo;une mobilisation autour de ces questions-l&agrave;. Pour toi, c&rsquo;est vraiment l&rsquo;aspect le plus visible pour le moment&nbsp;?</strong><br /><br />Oui.<br /><br /><strong>Et au niveau politique ou au niveau des acteurs &eacute;conomiques mis en cause dans ton enqu&ecirc;te, as tu eu des retours&nbsp;?</strong><br /><br />Non, tr&egrave;s peu. Thierry Burlot, qui est dans la BD (NDLR&nbsp;: alors conseiller r&eacute;gional charg&eacute; de l&rsquo;eau et de l&rsquo;environnement), est venu se faire prendre en photo alors qu&rsquo;il est critiqu&eacute; dans la BD. Il a ensuite d&eacute;clar&eacute; sur les r&eacute;seaux sociaux qu&rsquo;il soutenait cet album. Le T&eacute;l&eacute;gramme [NDLR&nbsp;: du 7 juillet 2019] a fait deux pages sur la BD, avec du &laquo;&nbsp;pour&nbsp;&raquo; et du &laquo;&nbsp;contre&nbsp;&raquo;. Ce qui est &eacute;tonnant, c&rsquo;est que les trois &eacute;lus interrog&eacute;s et cit&eacute;s dans le T&eacute;l&eacute;gramme - comme Olivier Allain, vice-pr&eacute;sident &agrave; l&rsquo;agriculture de la r&eacute;gion Bretagne - avaient tous l&rsquo;air de reconna&icirc;tre, en partie, la solidit&eacute; de ce travail. La seule attaque qu&rsquo;on a en diffamation vient d&rsquo;un scientifique qui s&rsquo;appelle Christian Buson et qui travaille au c&ocirc;t&eacute; de l&rsquo;agro-alimentaire.<br /><br /><strong>Ce qui est particulier, c&rsquo;est qu&rsquo;il t&rsquo;attaque toi personnellement et non l&rsquo;&eacute;diteur&hellip;</strong> <br /><br />Oui.</p> <p style="text-align: justify;"><img src="http://lagazettedegouzy.fr/files/1579382721_2%20alguesVertes-p4.jpg" alt="" /></p> <p style="text-align: justify;">&copy; La Revue dessin&eacute;e &ndash; Delcourt, 2019 &ndash; Leraud, Van Hove</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><strong>Il y a aussi beaucoup de probl&egrave;mes quant &agrave; la diffusion de la BD...</strong><br /><br />L&agrave; par exemple, dans le Finist&egrave;re, la BD est invisible au Centre culturel Leclerc de Carhaix. Elle est dans les coulisses du magasin. Tu peux la demander, mais elle n&rsquo;est pas visible (NDLR&nbsp;: quelques exemplaires ont &eacute;t&eacute; mis en rayon depuis). Et &agrave; la maison de la presse du centre-ville, ils n&rsquo;arrivent pas &agrave; la commander.<br /><br /><strong>Les caf&eacute;s-librairies de Bretagne disent la m&ecirc;me chose&hellip;</strong><br /><br />Moi au d&eacute;part, quand j&rsquo;en parlais &agrave; mon &eacute;diteur, il avait l&rsquo;air tellement de bonne foi en me disant&nbsp;: &laquo;&nbsp;c&rsquo;est juste qu&rsquo;il y a du retard &ndash; et cela arrive tout le temps - qu&rsquo;on n&rsquo;a pas d&rsquo;imprimeur en France mais en Pologne et que Hachette a du retard &agrave; la livraison. C&rsquo;est pour cela qu&rsquo;il y a toujours des ruptures de stock.&nbsp;&raquo; Mais quand j&rsquo;entends les libraires, je me dis que cela vaudrait le coup d&rsquo;enqu&ecirc;ter pour chercher &agrave; en savoir plus. Les libraires disent par exemple que &laquo;&nbsp;Coop Breizh&nbsp;&raquo;, le diffuseur d&rsquo;Hachette en Bretagne, n&rsquo;a &eacute;t&eacute; fourni du livre qu&rsquo;&agrave; partir de novembre.<br /><br />Apr&egrave;s, il y a peut-&ecirc;tre eu des pressions sur Hachette, qui appartient &agrave; Lagard&egrave;re. <span style="color: #333333;"><strong>Se peut-il qu&rsquo;il y ait des liens entre Lagard&egrave;re, Jean-Yves Le Drian</strong> </span>[NDLR&nbsp;: pr&eacute;sident du conseil r&eacute;gional de Bretagne entre 2004 et 2017]<span style="color: #333333;"><strong>, une sorte de communaut&eacute; d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;ts, une solidarit&eacute;&hellip;&nbsp;?</strong></span><br /><br /><strong>Dans son dernier livre, &laquo;&nbsp;Il est o&ugrave;, le bonheur&nbsp;&raquo; (Les Liens Qui Lib&egrave;rent, 2019), Fran&ccedil;ois Ruffin &eacute;crit que dans les d&eacute;bats autour de l&rsquo;imp&eacute;ratif &eacute;cologique, il y a toujours des gens qui disent qu&rsquo;il suffirait de boycotter les multinationales ou qui insistent sur l&rsquo;importance des &laquo;&nbsp;petits gestes&nbsp;&raquo;. Ruffin affirme au contraire que rien n&rsquo;a jamais &eacute;t&eacute; obtenu par le boycott. Les conqu&ecirc;tes sociales ont toujours &eacute;t&eacute; le fruit de luttes sociales. L&rsquo;&eacute;cologie doit ainsi, selon lui, &ecirc;tre une lutte pour imposer de nouvelles r&egrave;gles communes. Sur un plan plus politique, est ce une conclusion que tu tires toi aussi&nbsp;?</strong><br /><br />Ma conclusion, c&rsquo;est vraiment qu&rsquo;il faut r&eacute;investir le politique, notamment local, &agrave; commencer par les conseils municipaux, les associations&nbsp;: essayer de trouver les moyens d&rsquo;habiter sa ville, sa commune, autrement que de mani&egrave;re hyper individuelle, c&rsquo;est-&agrave;-dire par le travail et la consommation. <span style="color: #333333;"><strong>Cela pose la question du travail qui nous accapare compl&egrave;tement</strong></span> et souvent &agrave; des fins avec lesquelles nous sommes en d&eacute;saccord. On parle toujours de la consommation, mais <span style="color: #333333;"><strong>ce qui occupe le plus nos vies c&rsquo;est le travail&nbsp;: o&ugrave; on travaille, pour qui, pourquoi&nbsp;?</strong></span> D&rsquo;autant plus que la majeure partie des produits agro-alimentaires bretons sont vou&eacute;s &agrave; l&rsquo;export, donc le boycott n&rsquo;aura aucun effet. De ce point de vue l&agrave;, ma r&eacute;flexion est plut&ocirc;t de m&rsquo;int&eacute;resser &agrave; ce qui se passe &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle de la mairie et &agrave; comment des communes aujourd&rsquo;hui arrivent &agrave; atteindre leur souverainet&eacute; alimentaire et &eacute;nerg&eacute;tique.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><img src="http://lagazettedegouzy.fr/files/1579383119_4%20-%20Goutal.jpg" alt="" /></p> <p style="text-align: justify;">&copy; Alain Goutal</p> <p style="text-align: justify;"><br /><strong>Comment, selon toi, le travail pourrait-il &ecirc;tre repens&eacute;&nbsp;?</strong><br /><br />Ce que j&rsquo;observe en tant que journaliste, c&rsquo;est la difficult&eacute; que j&rsquo;ai &agrave; obtenir des t&eacute;moignages ou non. Je vois bien que sur des sujets tels que le nucl&eacute;aire, les pesticides, c&rsquo;est extr&ecirc;mement difficile d&rsquo;obtenir des t&eacute;moignages de salari&eacute;s en activit&eacute;. Je n&rsquo;ai quasiment jamais pu en avoir et on voit aussi qu&rsquo;en g&eacute;n&eacute;ral, les salari&eacute;s sont bizarrement du c&ocirc;t&eacute; du patronat pour d&eacute;fendre leurs usines. &Agrave; Fessenheim, cette centrale nucl&eacute;aire situ&eacute;e sur une faille sismique, les salari&eacute;s d&eacute;fendent la centrale et servent ainsi les int&eacute;r&ecirc;ts du patronat. J&rsquo;observe aussi autre chose. Souvent, quand les gens que je connais partent &agrave; la retraite, je vois bien que leur discours change du tout au tout. <span style="color: #333333;"><strong>Dans certaines formes de travail aujourd&rsquo;hui, il y a donc bien une pression qui s&rsquo;exerce sur la parole et sur l&rsquo;esprit critique.</strong></span> Quand les gens sont &agrave; la retraite, je vois aussi qu&rsquo;ils sont plus libres et ont plus de temps pour s&rsquo;investir pour le bien commun. <br /><br />Toutes ces observations m&rsquo;ont amen&eacute; &agrave; me dire&nbsp;: <span style="color: #333333;"><strong>est-ce que le &laquo;&nbsp;revenu universel&nbsp;&raquo; ne serait pas une piste int&eacute;ressante pour changer de mod&egrave;le de soci&eacute;t&eacute;&nbsp;?</strong></span> Ainsi, les gens n&rsquo;auraient plus peur de perdre leur emploi, &agrave; Fessenheim par exemple, puisque une base de revenu leur serait assur&eacute;e. Ils pourraient peut-&ecirc;tre se r&eacute;orienter vers des activit&eacute;s qui leur para&icirc;traient avoir plus de sens et qui seraient plus respectueuses de leurs valeurs. Concernant tous les grands sujets environnementaux, que ce soit l&rsquo;amiante, les boues rouges, le nucl&eacute;aire ou les pesticides, <span style="color: #333333;"><strong>aujourd&rsquo;hui ce qu&rsquo;on nous oppose, c&rsquo;est l&rsquo;emploi. Comment faire sauter ce verrou&nbsp;?</strong></span> Derri&egrave;re tout &ccedil;a, pour moi, la question de la prise de d&eacute;cision et celle des relations de domination et de pouvoir sont clairement au c&oelig;ur du probl&egrave;me. La structure politique de notre soci&eacute;t&eacute; est encore tr&egrave;s hi&eacute;rarchis&eacute;e et tr&egrave;s pyramidale et je pense qu&rsquo;il faudrait trouver des solutions pour rendre cela plus d&eacute;mocratique &agrave; tous les niveaux, y compris au travail. L&rsquo;entreprise est un endroit de non d&eacute;mocratie absolue.<br /><br /><strong>Lors de tes enqu&ecirc;tes dans le milieu agricole, tu as rencontr&eacute; des gens qui ont r&eacute;ussi &agrave; s&rsquo;extraire de ces rapports salariaux et &agrave; r&eacute;inventer, au moins en partie, un rapport plus libre au travail...</strong><br /><br />Effectivement, il y a &eacute;norm&eacute;ment d&rsquo;agriculteurs qui travaillent dans de petites structures, g&eacute;n&eacute;ralement bio, mais pas forc&eacute;ment, et qui ne travaillent pas pour une coop&eacute;rative. Ils vendent en direct et ont r&eacute;ussi &agrave; se lib&eacute;rer compl&egrave;tement de cette contrainte d&rsquo;&ecirc;tre uniquement salari&eacute;s.<br /><br /><strong>On a l&rsquo;impression que face aux &laquo;&nbsp;lanceurs d&rsquo;alerte&nbsp;&raquo; et aux associations dont tu relates le &laquo;&nbsp;combat&nbsp;&raquo;, il n&rsquo;y a pas de r&eacute;elle volont&eacute; de se mettre autour de la table. On ne voit pas vraiment &eacute;merger l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une forme d&rsquo;&eacute;cologie qui serait consensuelle...</strong><br /><br />Comme pour le f&eacute;minisme, il y a pleins d&rsquo;&eacute;cologies diff&eacute;rentes. Il y a une &eacute;cologie hyper technocratique, il y a des discours de communication dans tous les sens, du &laquo;&nbsp;greenwashing&nbsp;&raquo;, des discours compl&egrave;tement d&eacute;connect&eacute;s des actes&hellip; Dans le cas des algues vertes, <span style="color: #333333;"><strong>ce qui est important pour moi, c&rsquo;est vraiment de r&eacute;fl&eacute;chir aux rapports de domination.</strong></span> Ces rapports de domination sont intrins&egrave;quement li&eacute;s &agrave; l&rsquo;&eacute;cologie. Ce sont les structures qui m&rsquo;int&eacute;ressent. Je ne pense pas que les &laquo;&nbsp;riches&nbsp;&raquo; soient compl&egrave;tement &agrave; jeter &agrave; la poubelle et que le dialogue soit impossible.<br /><br /><strong>Aujourd&rsquo;hui tu as quitt&eacute; la Bretagne. Peux-tu nous dire sur quel sujet tu travailles en ce moment&nbsp;?</strong> <br /><br />En ce moment j&rsquo;enqu&ecirc;te, mais je ne peux pas dire sur quoi. Je travaille avec le collectif d&rsquo;investigation &laquo;&nbsp;Disclose&nbsp;&raquo;<sup>2</sup> et des journalistes d&rsquo;investigation.<br /><br /><strong>Et penses-tu revenir un jour &agrave; la Bande Dessin&eacute;e&nbsp;?</strong><br /><br />Oui, j&rsquo;aimerais beaucoup.<br /><br /><br />Propos recueillis par Gwenha&euml;l Blorville le 18 d&eacute;cembre 2019.<br /><br /><strong>Cr&eacute;dit photo</strong>&nbsp;: sauf mention contraire, &copy; Gwenha&euml;l Blorville &ndash; La Gazette de Gouzy.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: large;"><strong>Publi&eacute; en PARTENARIAT avec &laquo; Mr Mondialisation &raquo; :<br /></strong></span></p> <p style="text-align: justify;"><a>https://mrmondialisation.org/</a></p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="https://mrmondialisation.org/"><img src="http://lagazettedegouzy.fr/files/1579295789_Mr-Mond_Logo_exe_RETINA.png" alt="" /></a></p> <p style="text-align: justify;">____________________________</p> <p style="text-align: justify;"><strong>Notes</strong></p> <p style="text-align: justify;">[1] <em>Algues vertes, l&rsquo;histoire interdite</em>, &Eacute;ditions Delcourt/La Revue Dessin&eacute;e, juin 2019.</p> <p style="text-align: justify;">[2] Le collectif &laquo;&nbsp;Disclose&nbsp;&raquo; se veut &laquo;&nbsp;&agrave; la fois un m&eacute;dia et une ONG&nbsp;&raquo; et se consacre &agrave; &laquo;&nbsp;&agrave; des probl&eacute;matiques fondamentales : les crimes environnementaux, l&rsquo;industrie agro-alimentaire, les libert&eacute;s fondamentales, la justice sociale, la d&eacute;linquance financi&egrave;re et la sant&eacute; publique.&nbsp;&raquo; <a href="https://disclose.ngo">https://disclose.ngo </a></p> Fri, 17 Jan 2020 22:15:14 GMT+2
<br /> <b>Warning</b>: Undefined array key "type" in <b>/homepages/14/d291669841/htdocs/gouzy/site/fluxrss.php</b> on line <b>75</b><br /> Fabrice Nicolino : « Notre revendication est élémentaire, on ne veut plus être empoisonnés » par les pesticides
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<p style="text-align: justify;"><strong><img src="images/pict/art-462-1.jpg" alt="" /></strong></p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><strong>Le 12 septembre dernier, un Appel r&eacute;clamant l&rsquo;interdiction de tous les pesticides chimiques de synth&egrave;se a &eacute;t&eacute; lanc&eacute;, avec une liste de 100 premiers signataires. V&eacute;ritable invitation &agrave; l&rsquo;action, l&rsquo;Appel &laquo;Nous voulons des coquelicots&nbsp;&raquo;<sup>1</sup> s&rsquo;accompagne de rassemblements chaque mois devant les mairies de France. Le journaliste Fabrice Nicolino, &agrave; l&rsquo;origine de l&rsquo;Appel, a accept&eacute; de r&eacute;pondre aux questions de La Gazette de Gouzy. L&rsquo;occasion de revenir &eacute;galement sur les enjeux de la &laquo;&nbsp;transition &eacute;cologique&nbsp;&raquo;. Entretien.</strong></p> <p style="text-align: justify;"><br /><strong><em>La Gazette de Gouzy&nbsp;:</em> Quel est le sens de cet Appel&nbsp;?</strong><br /><br /><em><strong>Fabrice Nicolino&nbsp;:</strong></em> Tout est parti d&rsquo;un bilan catastrophique. Il n&rsquo;y a pas de certitudes &agrave; 100&nbsp;% mais, d&rsquo;un point de vue scientifique, tout porte &agrave; croire que les pesticides sont responsables de la disparition extraordinaire des oiseaux. C&rsquo;est confirm&eacute; par d&rsquo;autres &eacute;tudes, notamment en Allemagne, sur les insectes. Vous imaginez bien que si les insectes disparaissent, un grand nombre d&rsquo;oiseaux insectivores disparaissent aussi parce qu&rsquo;ils n&rsquo;ont plus rien &agrave; manger. C&rsquo;est vrai aussi pour les papillons. D&rsquo;autres &eacute;tudes montrent &eacute;galement que la moiti&eacute; des papillons ont disparu en 20 ans. Ce sont un peu des images d&rsquo;apocalypses, il faut bien le dire, en France o&ugrave; personne n&rsquo;y pr&ecirc;te trop d&rsquo;importance, mais les chiffres sont clairs. On est face, vraiment, &agrave; une grosse grosse grosse catastrophe qui modifie compl&egrave;tement l&rsquo;image de la France. Ce pays auquel on &eacute;tait habitu&eacute; est en train de dispara&icirc;tre sous nos yeux et les gens de plus de 40 ans se souviennent forc&eacute;ment de l&rsquo;&eacute;poque o&ugrave;, quand on traversait la France en bagnole, on avait des insectes coll&eacute;s au pare-brise et on s&rsquo;arr&ecirc;tait pour nettoyer. &Ccedil;a a compl&egrave;tement disparu. On peut pratiquement traverser la France d&rsquo;un bout &agrave; l&rsquo;autre sans nettoyer son pare-brise. Donc, on est vraiment face &agrave; quelque chose d&rsquo;inou&iuml; et par ailleurs, on sait par d&rsquo;autres &eacute;tudes que des maladies graves se r&eacute;pandent chez les humains. Bien s&ucirc;r, les pesticides ne sont pas responsables de tout mais ils contribuent tout de m&ecirc;me &agrave; une aggravation de la sant&eacute; du public en France avec certains cas de maladies de Parkinson qui sont &agrave; coup s&ucirc;r li&eacute;s &agrave; une exposition aux pesticides, des cancers&hellip; En fait, le bilan est vraiment catastrophique et ce n&rsquo;est pas le bilan d&rsquo;&eacute;cologistes. C&rsquo;est celui de gens qui s&rsquo;informent, qui se renseignent et qui font confiance aux &eacute;tudes scientifiques ind&eacute;pendantes. <br /><br />Notre Appel est n&eacute; de ce constat l&agrave; et puis de l&rsquo;id&eacute;e qu&rsquo;on se fait balader depuis si longtemps. Il y a vraiment un lobby des pesticides extr&ecirc;mement puissant en France. Avec Fran&ccedil;ois Veillerette, nous avons sorti un livre pour accompagner la campagne des coquelicots, qui s&rsquo;appelle justement &laquo;&nbsp;Nous voulons des coquelicots&nbsp;&raquo;. Dans ce livre, nous racontons l&rsquo;histoire et la fa&ccedil;on dont le lobby des pesticides s&rsquo;est enracin&eacute; en France, comment il est n&eacute; apr&egrave;s guerre, &agrave; l&rsquo;&eacute;poque avec des intentions plut&ocirc;t bonnes. Ces gens l&agrave; pensaient qu&rsquo;avec l&rsquo;apparition des nouveaux pesticides de synth&egrave;se, comme par exemple le DDT, on allait venir &agrave; bout de quantit&eacute; de ravageurs de r&eacute;coltes, de champignons, de petits insectes&hellip; Ils sont partis avec ces intentions l&agrave; mais on s&rsquo;est rendu compte, un peu moins de 20 ans apr&egrave;s, que les pesticides &eacute;taient neurotoxiques pour tout ce qui est vivant, grosso modo autour de la parution du livre de l&rsquo;am&eacute;ricaine Rachel Carson &laquo;&nbsp;Le printemps silencieux&nbsp;&raquo;. En 1962, cette dame publie un livre aux &Eacute;tats-Unis [sous le titre original &laquo;&nbsp;Silent Spring&nbsp;&raquo;] qui est traduit l&rsquo;ann&eacute;e suivante en France. Elle y raconte d&rsquo;un point de vue scientifique, en en s&rsquo;appuyant sur l&rsquo;avis de tr&egrave;s grands scientifiques, la v&eacute;ritable histoire des pesticides. Elle montre pour la premi&egrave;re fois au monde que les pesticides s&rsquo;attaquent &agrave; tout ce qui est vivant. &Agrave; ce moment l&agrave;, il aurait &eacute;t&eacute; encore possible, sur le papier, de faire machine arri&egrave;re et de se dire &laquo;&nbsp;bon bah, on s&rsquo;est tromp&eacute;s, de bonne foi. On croyait bien faire et puis voil&agrave;, il se trouve que ces produits sont dangereux&nbsp;&raquo;. <br /><br />Cependant, l&rsquo;industrie ne fonctionne pas comme cela. Elle a ses chiffres d&rsquo;affaire &agrave; d&eacute;fendre. L&rsquo;industrie des pesticides n&rsquo;a pas fait machine arri&egrave;re et tout au contraire, a essay&eacute; d&rsquo;entrer dans une campagne, qui dure jusqu&rsquo;&agrave; aujourd&rsquo;hui, de d&eacute;nigrement des scientifiques ind&eacute;pendants, de d&eacute;sinformation, de mensonges et d&rsquo;organisation tr&egrave;s &eacute;labor&eacute;e de ce qu&rsquo;on appelle &laquo;&nbsp;la strat&eacute;gie du doute&nbsp;&raquo;. Elle cr&eacute;e des esp&egrave;ces d&rsquo;&eacute;cran de fum&eacute;e pour parler d&rsquo;autre chose ou bien pour mettre en doute ce qui est prouv&eacute; par des &eacute;tudes scientifiques. On est face aujourd&rsquo;hui &agrave; une industrie qui est devenue vraiment folle et criminelle&nbsp;! Elle ne veut plus entendre raison et est tr&egrave;s soutenue en France par le minist&egrave;re de l&rsquo;agriculture, en particulier parce que l&rsquo;industrie des pesticides a partie li&eacute;e avec le grand syndicat agricole, la FNSEA [F&eacute;d&eacute;ration nationale des syndicats d'exploitants agricoles]. Cela cr&eacute;e une sorte de conglom&eacute;rat qu&rsquo;il est tr&egrave;s tr&egrave;s difficile de combattre, parce que tous les pouvoirs officiels, la FNSEA, l&rsquo;industrie et certains scientifiques qui marchent pour l&rsquo;industrie, tentent d&eacute;sesp&eacute;r&eacute;ment de cacher la v&eacute;rit&eacute;. Grosso modo, la v&eacute;rit&eacute;, c&rsquo;est qu&rsquo;il y a vraiment une sorte d&rsquo;h&eacute;catombe des formes de vie en France et c&rsquo;est pourquoi, on s&rsquo;est dit que ce n&rsquo;est plus la peine de tergiverser. Quand on arrive &agrave; obtenir, apr&egrave;s 10 ans de combat, l&rsquo;interdiction d&rsquo;un pesticide, il y en a d&eacute;j&agrave; deux, trois, parfois dix nouveaux sur le march&eacute;, qui l&rsquo;ont remplac&eacute; et qui pr&eacute;sentent eux-m&ecirc;mes des probl&egrave;mes de toxicit&eacute; importants. Donc, on s&rsquo;est dit qu&rsquo;il fallait prendre le probl&egrave;me &agrave; la racine et demander l&rsquo;interdiction d&eacute;finitive de tous les pesticides de synth&egrave;se parce qu&rsquo;ils sont trop dangereux, tout simplement. Il y a des combinaisons chimiques entre diff&eacute;rents pesticides qui forment des esp&egrave;ces de cocktails dont on ne sait presque rien. La logique, c&rsquo;est donc d&rsquo;interdire les pesticides. Les humains se sont pass&eacute;s de pesticides chimiques pendant des millions d&rsquo;ann&eacute;es alors que depuis 70 ans, on les utilise massivement et de mani&egrave;re compl&egrave;tement folle. Il faut &agrave; pr&eacute;sent revenir &agrave; la raison. Il importe de refermer aussi vite que possible cette tr&egrave;s tr&egrave;s mauvaise parenth&egrave;se et de repenser l&rsquo;activit&eacute; agricole, l&rsquo;usage des sols&hellip; En fait, il y a une revendication totalement &eacute;l&eacute;mentaire, qui est juste de dire que l&rsquo;on ne veut plus &ecirc;tre empoisonn&eacute;s.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><img src="images/pict/art-462-2.jpg" alt="" /><br /><br /><strong>Et du coup, vous lancez une mobilisation qui pourrait durer deux ans. Pourquoi deux ans&nbsp;?</strong><br /><br />Elle durera peut-&ecirc;tre plus longtemps, mais elle va durer au minimum deux ans parce qu&rsquo;on se dit qu&rsquo;il faut r&eacute;unir beaucoup de forces. On veut r&eacute;unir 5 millions de signatures, 5 millions de soutiens &agrave; notre Appel. On pense qu&rsquo;il est n&eacute;cessaire de montrer que l&rsquo;opinion en France est contre les pesticides. Si on y parvient, on pourra parler haut et clair et on pourra par exemple, c&rsquo;est une id&eacute;e personnelle, exiger un r&eacute;f&eacute;rendum national sur le sujet. C&rsquo;est une course de fond et il ne faut pas l&acirc;cher. On se retrouve tous les mois, le premier vendredi de chaque mois, devant les mairies. Le prochain rendez-vous, c&rsquo;est le 7 d&eacute;cembre &agrave; 18h30 devant les mairies. Nous avons &eacute;t&eacute; tr&egrave;s surpris de l&rsquo;importance du soutien &agrave; &laquo;&nbsp;L&rsquo;Appel des coquelicots&nbsp;&raquo;, puisque d&egrave;s le 5 octobre, soit 3 semaines apr&egrave;s avoir publi&eacute; l&rsquo;Appel, il y a eu 500 rassemblements en France. C&rsquo;est colossal, tr&egrave;s consid&eacute;rable. Le 2 novembre, en pleines vacances de la Toussaint, on a par ailleurs eu la grande surprise de voir 647 rassemblements en France. Nous attendons maintenant avec impatience les rendez-vous du 7 d&eacute;cembre. C&rsquo;est vraiment un mouvement qui s&rsquo;enracine en France. Plein de questions ne sont pas r&eacute;gl&eacute;es, &ccedil;a c&rsquo;est s&ucirc;r, mais en tout cas on a lanc&eacute; cette initiative qui est une sorte de souffle lib&eacute;rateur en France et je crois que &ccedil;a va durer. <br /><br /><strong>Vous avez lanc&eacute;, vous l&rsquo;avez dit, un objectif de 5 millions de signatures et vous pr&eacute;cisez bien que cela n&rsquo;est pas une p&eacute;tition&hellip;</strong><br /><br />Non, ce n&rsquo;est pas du tout une p&eacute;tition. Une p&eacute;tition, c&rsquo;est quelque chose de st&eacute;rile pour moi. Une p&eacute;tition, &ccedil;a donne bonne conscience. Vous donnez votre signature et puis vous tournez les talons et vous passez &agrave; autre chose. &Ccedil;a, ce n&rsquo;est pas du tout notre d&eacute;marche. C&rsquo;est un Appel &agrave; l&rsquo;action de longue dur&eacute;e, sur deux ans, et on demande aux gens qui nous soutiennent de le montrer, par des actions aussi petites soient-elles. L&rsquo;important, c&rsquo;est que ces actions soient l&agrave; et que les gens agissent, non pas derri&egrave;re un &eacute;cran d&rsquo;ordinateur mais dans la r&eacute;alit&eacute;, en se retrouvant. On va assister &agrave; une mont&eacute;e d&rsquo;initiatives concr&egrave;tes et r&eacute;elles. On n&rsquo;est plus dans le virtuel. On n&rsquo;est plus dans la signature et puis on passe &agrave; autre chose. Non, l&agrave; on s&rsquo;engage &agrave; agir ensemble. C&rsquo;est vraiment une autre mani&egrave;re de consid&eacute;rer les choses. Les engagements virtuels, personnellement j&rsquo;en ai compl&egrave;tement marre, c&rsquo;est-&agrave;-dire cette fa&ccedil;on d&eacute;glingu&eacute;e de cliquer sur son clavier d&rsquo;ordinateur et de ne pas se sentir plus concern&eacute; que &ccedil;a. &Ccedil;a, &ccedil;a ne va pas. Il faut montrer de l&rsquo;action r&eacute;elle et c&rsquo;est &ccedil;a &laquo;&nbsp;L&rsquo;Appel des coquelicots&nbsp;&raquo;.<br /><br /><strong>Vous affirmez que c&rsquo;est vraiment d&eacute;sormais &laquo;&nbsp;la soci&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo; qui parle. Du coup, cela signifie qu&rsquo;aucune alliance n&rsquo;est possible aujourd&rsquo;hui avec un parti politique quel qu&rsquo;il soit&nbsp;?</strong><br /><br />Hol&agrave;, non, attendez. L&rsquo;appel, il est n&eacute; aussi d&rsquo;une exasp&eacute;ration devant le silence des politiques et devant leur complicit&eacute;. Depuis 40 ans, on a vu se succ&eacute;der en France des &eacute;quipes de droite et de gauche. Toutes les &eacute;quipes, toutes, ont soutenu l&rsquo;industrie des pesticides. Il n&rsquo;y en a pas une seule qui ait os&eacute; affronter le lobby des pesticides donc on n&rsquo;a aucune raison de faire confiance aux pouvoirs politiques. On n&rsquo;a pas confiance. Notre Appel, c&rsquo;est un appel d&rsquo;humains. Ce n&rsquo;est pas un appel qui se situe sur un axe politique. Ce n&rsquo;est pas un appel d&rsquo;&eacute;cologistes. C&rsquo;est un appel d&rsquo;humains adress&eacute; &agrave; d&rsquo;autres humains. Tout le monde peut et doit signer notre Appel, mais on ne rentre pas dans le champs politique. On ne passe aucun accord avec aucun parti politique, ni aujourd&rsquo;hui, ni demain, ni jamais. &Ccedil;a, c&rsquo;est clair.<br /><br /><strong>La France envisage l&rsquo;interdiction du glyphosate d&rsquo;ici la fin 2020/d&eacute;but 2021 ou, pour reprendre les mots d&rsquo;Emmanuel Macron, &laquo;&nbsp;d&egrave;s que des alternatives auront &eacute;t&eacute; trouv&eacute;es&nbsp;&raquo;. Vous, au contraire, vous refusez d&rsquo;entrer dans ce d&eacute;bat des alternatives&hellip;</strong><br /><br />Franchement, je vais &ecirc;tre un peu incorrect, c&rsquo;est de la connerie. C&rsquo;est de la d&eacute;magogie. &Ccedil;a ne veut rien dire. C&rsquo;est un discours qu&rsquo;on entend depuis des d&eacute;cennies. En 2008, le pr&eacute;sident de l&rsquo;&eacute;poque, Nicolas Sarkozy, a lanc&eacute; &agrave; grands sons de trompes, un plan dit &laquo;&nbsp;Ecophyto&nbsp;&raquo;. Des centaines de millions d&rsquo;euros publics ont &eacute;t&eacute; d&eacute;pens&eacute;s, en vain. Le plan &laquo;&nbsp;Ecophyto&nbsp;&raquo; visait &agrave; r&eacute;duire de moiti&eacute; l&rsquo;usage des pesticides en France. Le plan &laquo;&nbsp;Ecophyto&nbsp;&raquo; a co&ucirc;t&eacute; des centaines de millions d&rsquo;euros et j&rsquo;aimerais bien savoir &agrave; quoi et &agrave; qui cela a servi, parce qu&rsquo;au bout de 6 ans, l&rsquo;usage des pesticides n&rsquo;a pas diminu&eacute; de 50&nbsp;% mais a, au contraire, augment&eacute; de 20&nbsp;%. Ce fut un &eacute;chec, un d&eacute;sastre total et l&agrave;, &agrave; nouveau, on nous joue la m&ecirc;me com&eacute;die. Le probl&egrave;me, c&rsquo;est que le gouvernement actuel soutient l&rsquo;industrie des pesticides, soutient l&rsquo;agriculture industrielle et cherche &agrave; gagner du temps. Le glyphosate sera probablement interdit mais on s&rsquo;en fout. Ce n&rsquo;est pas du tout le sujet. Moi, je sais parfaitement que quand un produit est &eacute;limin&eacute;, au bout de 10 ans, 15 ans, 20 ans parfois, il y a d&rsquo;autres produits en place qui ont des effets redoutables de toxicit&eacute;. Il faut se rappeler que le DDT a &eacute;t&eacute; interdit en France en 1972, il y a donc 46 ans et on retrouve encore du DDT dans les analyses de cheveux des gens. C&rsquo;est le syst&egrave;me lui-m&ecirc;me qui produit des poisons et qui veut &agrave; tout prix les vendre, les vendre et les vendre. Dans 91&nbsp;% des pr&eacute;l&egrave;vements r&eacute;alis&eacute;s chaque ann&eacute;e dans les eaux de surface, les rivi&egrave;res notamment, on retrouve des pesticides. On en retrouve dans les deux tiers des grandes nappes d&rsquo;eau souterraines. Donc, interdire le glyphosate ou pas, j&rsquo;en ai rien &agrave; foutre&nbsp;! Je le dis tr&egrave;s calmement, cela ne m&rsquo;int&eacute;resse pas. Je ne me sens pas concern&eacute; par &ccedil;a, parce que je sais que c&rsquo;est une supercherie. Certains pensent peut-&ecirc;tre que c&rsquo;est une bonne chose et je respecte leur point de vue, mais je leur dis qu&rsquo;ils se trompent totalement. Cela ne servira &agrave; rien. C&rsquo;est le syst&egrave;me qu&rsquo;il faut d&eacute;truire, ce n&rsquo;est pas tel ou tel produit, tel ou tel pesticide.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><img src="images/pict/art-462-3.jpg" alt="" /><br /><br /></p> <p style="text-align: justify;"><strong>Une id&eacute;e en vogue dans la mouvance de l'&eacute;cologie politique est que la transition &eacute;cologique est d&eacute;j&agrave; en marche. On retrouve par exemple cette id&eacute;e dans le film de Marie-Monique Robin<sup>2</sup>, &laquo;&nbsp;Sacr&eacute;e croissance&nbsp;!&nbsp;&raquo;, o&ugrave; elle d&eacute;fend la th&egrave;se selon laquelle de nombreuses alternatives iraient aujourd&rsquo;hui dans le sens d&rsquo;une transition vers une soci&eacute;t&eacute; post-croissance. Alors, la transition &eacute;cologique est-elle bien d&eacute;j&agrave; en marche&nbsp;?</strong><br /><br />Non, &eacute;videmment que non, elle n&rsquo;est pas du tout en route. &Ccedil;a me para&icirc;t compl&egrave;tement absurde de voir les choses de la sorte. Par quelle esp&egrave;ce de miracle, la transition &eacute;cologique pourrait-elle &ecirc;tre en marche, &eacute;tant entendu qu&rsquo;il y a un accord des forces politiques existantes pour continuer &agrave; aller dans la m&ecirc;me direction. Il n&rsquo;y a aucune mise en cause. Oui, il y a des paroles, des paroles, il y en a des centaines et des milliers. Vous savez comme moi que Macron a &eacute;t&eacute; sacr&eacute; &laquo;&nbsp;champion de la terre&nbsp;&raquo;<sup>3</sup>, mais tout &ccedil;a c&rsquo;est juste de la parole. Ce sont des paroles que l&rsquo;on entend davantage aujourd&rsquo;hui, mais que l&rsquo;on a d&eacute;j&agrave; entendu pendant des d&eacute;cennies. Souvenez-vous du fameux &laquo;&nbsp;Grenelle de l&rsquo;environnement en 2007&nbsp;&raquo; qui promettait &agrave; la France une r&eacute;volution &eacute;cologique, rien de moins&nbsp;! Au bout d&rsquo;un an, Sarkozy change pourtant d&rsquo;avis et d&eacute;clare au Salon de l&rsquo;Agriculture, l&rsquo;environnement &laquo;&nbsp;&ccedil;a commence &agrave; bien faire&nbsp;&raquo;. La fa&ccedil;on de voir des politiciens n&rsquo;a absolument pas chang&eacute;. En ce moment, par exemple, il y a des gr&eacute;vistes de la faim &agrave; Strasbourg pour essayer d&rsquo;emp&ecirc;cher la construction d&rsquo;une autoroute urbaine d&rsquo;une vingtaine de kilom&egrave;tres. Cela va compl&egrave;tement &agrave; l&rsquo;encontre des propos qui sont tenus. On n&rsquo;a pas arr&ecirc;t&eacute; le projet d&rsquo;a&eacute;roport de Notre-Dame-des-Landes pour des raisons &eacute;cologiques. Les forces politiques sont d&rsquo;accord pour des autoroutes, des centrales nucl&eacute;aires, des a&eacute;roports, la production de biens mat&eacute;riels, ainsi que pour des trait&eacute;s commerciaux qui d&eacute;truisent la plan&egrave;te&hellip; C&rsquo;est vraiment le moteur &agrave; explosion de la crise climatique, donc transition &eacute;cologique, bien s&ucirc;r que non. Ce gouvernement et tant d&rsquo;autres et m&ecirc;me des &eacute;cologistes officiels, vantent le mod&egrave;le de la voiture &eacute;lectrique comme symbole d&rsquo;une transition &eacute;nerg&eacute;tique. Mais qu&rsquo;est-ce que cette farce&nbsp;? La voiture &eacute;lectrique marche &agrave; l&rsquo;&eacute;lectricit&eacute; par d&eacute;finition. Or en France, 75&nbsp;% de l&rsquo;&eacute;lectricit&eacute;, c&rsquo;est du nucl&eacute;aire. D&rsquo;autre part, la voiture &eacute;lectrique repose sur des quantit&eacute;s consid&eacute;rables de m&eacute;taux pr&eacute;cieux et de terres rares. Aucun politique ne sugg&egrave;re, ne propose ni n&rsquo;envisage de rompre avec ce monde de la bagnole. Pas une seule force politique, que ce soient les Insoumis ou d&rsquo;autres, ne met en cause la bagnole. Je relisais il y a peu l&rsquo;esp&egrave;ce de cri de col&egrave;re de Ren&eacute; Dumont, le candidat &eacute;cologiste &agrave; l&rsquo;&eacute;lection pr&eacute;sidentielle de 1974, contre la bagnole. Aujourd&rsquo;hui, on n&rsquo;ose m&ecirc;me plus s&rsquo;attaquer au Dieu bagnole qui est quand m&ecirc;me un symbole extr&ecirc;mement puissant et convaincant de la crise &eacute;cologique dans laquelle nous sommes plong&eacute;s.<br /><br /><strong>Mais est-ce que vous ne pensez pas, &agrave; l&rsquo;instar de la r&eacute;alisatrice Marie-Monique Robin, qu&rsquo;il y a aujourd&rsquo;hui des alternatives citoyennes, dans des domaines aussi vari&eacute;s que les monnaies locales, la relocalisation alimentaire&hellip; qui vont dans le sens d&rsquo;une transition &eacute;cologique&nbsp;?</strong><br /><br />Je soutiens tous ceux qui se battent et qui cr&eacute;ent de nouvelles formes d&rsquo;organisation, mais ce n&rsquo;est pas de nature &agrave; inverser le courant. Le probl&egrave;me, c&rsquo;est que personne ne semble &ecirc;tre capable de penser le changement politique et de dire ce que serait un changement politique permettant enfin d&rsquo;affronter la question &eacute;cologique. Personne ne se pose la question. Tout le monde semble croire qu&rsquo;en additionnant des petits pas, on arrivera &agrave; de grands changements. Je n&rsquo;y crois pas une seule seconde. Je pense, pour ma part, que l&rsquo;une des priorit&eacute;s, c&rsquo;est d&rsquo;&ecirc;tre capable de penser le changement. Au plan des id&eacute;es et des paroles, tout le monde est d&rsquo;accord pour dire qu&rsquo;il faut de grands changements, mais &ccedil;a veut dire quoi de grands changements&nbsp;? &Ccedil;a veut dire attendre que les &eacute;lections approchent&nbsp;? Les discours qui font croire que nous sommes sur une bonne route m&rsquo;insupportent, parce que ce n&rsquo;est pas le cas. Ce n&rsquo;est pas un discours de d&eacute;sespoir. Moi, je plaide pour la clart&eacute; et pour qu&rsquo;il y ait une grande r&eacute;flexion nationale et m&ecirc;me mondiale, pour savoir comment on sort de cette soci&eacute;t&eacute; dont le mod&egrave;le social et &eacute;conomique est fond&eacute; sur la destruction de tous les &eacute;quilibres naturels, car c&rsquo;est &ccedil;a dont il s&rsquo;agit. Nos modes de production et de consommation des objets dans ce monde, en France comme ailleurs, concourent puissamment &agrave; la destruction des &eacute;quilibres naturels. Les animaux disparaissent &agrave; un rythme compl&egrave;tement dingue. Le d&eacute;r&egrave;glement climatique risque de rendre inhabitable des zones enti&egrave;res de la plan&egrave;te. Quand on est en face de ph&eacute;nom&egrave;nes de cette sorte, on ne peut rester assis sur une chaise en pr&eacute;tendant que la transition &eacute;cologique est en route. C&rsquo;est ridicule.<br /><br />Propos recueillis par Gwenha&euml;l Blorville le 12 novembre 2018.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: left;"><span style="color: #808080;">___________________________</span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: small;"><strong>Notes</strong></span></p> <p><span style="font-size: small;">[1] <a href="https://nousvoulonsdescoquelicots.org/&Acirc;&nbsp;">https://nousvoulonsdescoquelicots.org/&nbsp;</a> </span></p> <p><span style="font-size: small;">[2] La r&eacute;alisatrice Marie-Monique Robin a r&eacute;alis&eacute; de nombreux films documentaires engag&eacute;s, parmi lesquels&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le Monde selon Monsanto&nbsp;&raquo; (2008), &laquo;&nbsp;Les Moissons du futur&nbsp;&raquo; (2012), &laquo;&nbsp;Sacr&eacute;e croissance&nbsp;!&nbsp;&raquo; (2014), &laquo;&nbsp;Le Roundup face &agrave; ses juges&nbsp;&raquo; (2017)...</span></p> <p><span style="font-size: small;">[3] Le 26 septembre 2018, Emmanuel Macron s&rsquo;est vu d&eacute;cerner le titre de &laquo;&nbsp;Champion de la Terre&nbsp;&raquo; par le Programme des Nations Unies pour l&rsquo;Environnement (PNUE), &agrave; l&rsquo;issue du One Planet Summit de New York, un sommet international sur le climat en marge de l&rsquo;ONU.</span></p> Mon, 26 Nov 2018 22:02:48 GMT+2
<br /> <b>Warning</b>: Undefined array key "type" in <b>/homepages/14/d291669841/htdocs/gouzy/site/fluxrss.php</b> on line <b>75</b><br /> Assa Traoré : « On demande juste un droit, une vérité et une justice »
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<p style="text-align: justify;"><strong><img src="images/pict/art-459-1.jpg" alt="" /></strong></p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><strong>Le 19 juillet 2016, Adama Traor&eacute;, jeune fran&ccedil;ais d'origine malienne, d&eacute;c&eacute;dait lors de son interpellation par la gendarmerie. Depuis, sa famille et leurs soutiens ne cessent de r&eacute;clamer V&eacute;rit&eacute; et Justice&nbsp;: V&eacute;rit&eacute; pour Adama et Justice &eacute;gale pour tous. &Agrave; ce jour, trois plaintes ont &eacute;t&eacute; d&eacute;pos&eacute;es par la famille, pour &laquo;&nbsp;violences volontaires ayant entra&icirc;n&eacute; la mort sans intention de la donner&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;non-assistance &agrave; personne en danger&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;faux en &eacute;criture publique et d&eacute;nonciation calomnieuse&nbsp;&raquo;. Cette qu&ecirc;te de v&eacute;rit&eacute; se paie cependant au prix fort, celui d'un acharnement de l'&Eacute;tat. &Agrave; l'occasion de la venue d'Assa Traor&eacute;, l'une des s&oelig;urs d'Adama, &agrave; Plourin-l&egrave;s-Morlaix (29) pour le festival &laquo;&nbsp;L'autre c'est toi, c'est moi&nbsp;&raquo;, La Gazette de Gouzy l'a rencontr&eacute;e. Entretien.</strong><br /><br /><br /><strong><em>La Gazette de Gouzy</em>&nbsp;: Votre avocat, Yassine Bouzrou, vient de demander une reconstitution des faits, c'est-&agrave;-dire de l'interpellation d'Adama par les gendarmes. Pouvez-vous m'en dire plus sur cette demande&nbsp;?</strong><br /><br /><em><strong>Assa Traor&eacute;</strong></em>&nbsp;: Aujourd'hui, pour notre avocat, il est important de demander cette reconstitution pour imposer le plus rapidement possible une mise en examen de ces gendarmes et surtout pour conna&icirc;tre la v&eacute;rit&eacute; et le r&ocirc;le de chacun dans la mort de mon fr&egrave;re le 19 juillet 2016. Que chacun puisse reprendre son r&ocirc;le, pas mon fr&egrave;re malheureusement et que l'on puisse amener le plus rapidement possible une mise en examen sur toutes les plaintes qu'on a pu porter sur les gendarmes. Parce qu'aujourd'hui, il y a beaucoup de mensonges. On a besoin que cette reconstitution soit quelque chose de tr&egrave;s fort dans l'aspect judiciaire et surtout, d'apporter un rapport de force avec la justice parce que le jour de la reconstitution, si elle est accept&eacute;e, les trois juges seront pr&eacute;sents, les gendarmes seront pr&eacute;sents, les grad&eacute;s seront pr&eacute;sents et peut-&ecirc;tre aussi des personnes d'&Eacute;tat. Donc aujourd'hui, on veut que nos soutiens soient &agrave; nos c&ocirc;t&eacute;s, on veut pouvoir apporter un rapport de force tr&egrave;s fort et que le monde entier suive cette reconstitution parce qu'on la rendra publique.<br /><br /><strong>En juillet dernier, vous d&eacute;clariez qu'il y avait de fortes chances que la mise en examen des gendarmes li&eacute;s au d&eacute;c&egrave;s d'Adama soit prononc&eacute;e assez rapidement, ce qui serait une &eacute;tape importante dans la recherche de v&eacute;rit&eacute; que vous poursuivez. Cette mise en examen ne s'est toujours pas produite. Avez-vous des nouvelles des proc&eacute;dures en cours&nbsp;?</strong> <br /><br />Il y a une proc&eacute;dure qui doit se d&eacute;rouler au mois de mai et en fait, la juge veut attendre cette proc&eacute;dure pour prononcer, ou non, cette mise en examen. Elle nous l'avait promis depuis tr&egrave;s longtemps, &ccedil;a a pris &eacute;norm&eacute;ment de temps et aujourd'hui, on veut lui imposer cette reconstitution pour ne pas qu'elle nous balade encore longtemps et pour qu'elle prononce la mise en examen. La v&eacute;rit&eacute;, elle est l&agrave; et on la veut tout de suite. On l'attend depuis tr&egrave;s longtemps, on arrive aux deux ans et il n'y a toujours pas de mise en examen et &ccedil;a, c'est inadmissible. Si on n'obtient pas ce qu'on veut, on redescendra dans les rues, on ira au tribunal de Paris et on fera autant de bruit que l'on pourra. <br /><br /><strong>&Agrave; la fin du livre &laquo;&nbsp;Lettre &agrave; Adama&nbsp;&raquo;, publi&eacute; en mai 2017<sup>1</sup>, vous citiez alors votre avocat, Yassine Bouzrou, selon lequel il est &laquo;&nbsp;possible de faire preuve aujourd'hui d'un optimisme raisonnable.&nbsp;&raquo; Presque un an apr&egrave;s, partagez-vous toujours aujourd'hui ce sentiment&nbsp;?</strong><br /><br />Quand je vois la fa&ccedil;on dont se d&eacute;roule le combat de certaines familles, oui, parce qu'il faut savoir que nous on a ramen&eacute; beaucoup de v&eacute;rit&eacute;s. Tout de suite ils ont criminalis&eacute; mon fr&egrave;re. On leur a dit que c'&eacute;tait faux. On a demand&eacute; une contre-autopsie tr&egrave;s rapidement qui a d&eacute;menti la premi&egrave;re autopsie. On a fait dessaisir un procureur. On a fait d&eacute;payser l'affaire de mon fr&egrave;re. On a eu trois juges au mois de janvier, chose tr&egrave;s rare dans une affaire de violence polici&egrave;re. On a eu une nouvelle expertise qui a confirm&eacute; la n&ocirc;tre. Donc, quand je vois tout &ccedil;a et quand je vois qu'il y a encore des familles pour lesquelles cinq ans apr&egrave;s, il n'y a toujours pas eu de contre-autopsie et qu'il n'y a pas d'avanc&eacute;es, on peut garder cet optimisme dans le combat.<br /><br /><strong>Malgr&eacute; le non-lieu prononc&eacute; le 23 f&eacute;vrier dernier &agrave; l'encontre de votre fr&egrave;re Bagui<sup>2</sup>, l'acharnement judiciaire se poursuit &agrave; l'encontre de la famille Traor&eacute;. Des proc&egrave;s sont pr&eacute;vus en avril. Pouvez-vous faire un point sur les proc&eacute;dures en cours contre vos fr&egrave;res&nbsp;?</strong> <br /><br />Normalement le 22 mars, Bagui aura quatre proc&egrave;s dans la m&ecirc;me journ&eacute;e, notamment pour une extorsion de fonds de 50 euros. En fait, &agrave; travers tous ces proc&egrave;s, on pointe le ridicule du syst&egrave;me judiciaire de Pontoise. Il y a un r&eacute;el acharnement sur la famille Traor&eacute;. Ils n'ont tellement rien qu'ils vont gratter au plus profond du ridicule pour nous amener toutes les proc&eacute;dures et les proc&egrave;s qu'ils peuvent nous mettre sur le dos, parce qu'ils ont &eacute;t&eacute; humili&eacute;s. Quand on leur dit qu'ils mentent dans l'affaire Adama, que l'affaire leur est enlev&eacute;e, que le procureur est dessaisi, ils se sentent humili&eacute;s. Aujourd'hui, ils nous le font payer &agrave; Pontoise parce que c'est aussi un combat contre la justice &agrave; Pontoise qui nous apporte des proc&egrave;s &agrave; tout va qui n'ont aucun sens. Aujourd'hui, on a une affaire d'extorsion de 50 euros sur le t&eacute;moin principal de la mort d'Adama. Au mois d'Avril, Yacuba aussi sera au tribunal parce qu'il a mis le pied devant la porte de cette gendarmerie le 19 juillet 2016. Aujourd'hui, il est accus&eacute; d'intrusion et de violence sur les gendarmes. Voil&agrave; jusqu'o&ugrave; va le ridicule dans le combat qui est le n&ocirc;tre pour nous faire taire. Mais derri&egrave;re ce ridicule, le nerf de la guerre, c'est l'argent parce que pour chaque proc&eacute;dure, il y a de l'argent &agrave; sortir. Donc oui, ils nous atteignent au niveau financier, mais on veut surtout que l'opinion publique puisse voir comment le syst&egrave;me judiciaire est anti-d&eacute;mocratique avec la famille Traor&eacute;.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><img src="images/pict/art-459-2.jpg" alt="" /></p> <p style="text-align: justify;"><br /><strong>Selon vous, l'ind&eacute;pendance de la justice a t-elle &eacute;t&eacute; largement bafou&eacute;e jusqu'&agrave; aujourd'hui&nbsp;?</strong><br /><br />Je ne serais pas l&agrave; sinon. Je ne serais pas aujourd'hui &agrave; Morlaix. Normalement, je n'aurais pas &agrave; me d&eacute;placer s'il n'y avait pas une justice &agrave; deux vitesses et si on avait le droit &agrave; la justice comme tout le monde. On ne qu&eacute;mande personne. On demande juste un droit, une v&eacute;rit&eacute; et une justice dans la mort de mon fr&egrave;re. Si on s'est d&eacute;plac&eacute;s dans toutes ces villes de France et &agrave; l'international, c'est que la justice ne nous &eacute;coute pas. On n'a pas &agrave; faire cela normalement. Bien s&ucirc;r qu'il n'y a pas de justice. Nous, on nous fait subir des actes anti-d&eacute;mocratiques dans un pays qui clame dans le monde entier libert&eacute;, &eacute;galit&eacute;, fraternit&eacute;. <br /><br /><strong>L'&eacute;lection d'Emmanuel Macron en mai 2017 a-t-elle chang&eacute; quelque chose &agrave; ce qui ressemble fort &agrave; un acharnement sans fin&nbsp;?</strong><br /><br />Pas du tout. Cela n'a rien chang&eacute;. Apr&egrave;s, il faut savoir que pour arriver jusqu'ici aujourd'hui, on l'a fait tout seul, sans l'aide d'aucun politicien, &agrave; part Pouria Amirshahi<strong><sup>3</sup></strong> qui a eu le courage d'en parler &agrave; l'Assembl&eacute;e Nationale. Aujourd'hui, Emmanuel Macron fait comme si on n'existait pas, mais on va arriver sur son cas. Pour l'instant, on a ces choses-l&agrave; &agrave; g&eacute;rer mais quand on arrivera au cas d'Emmanuel Macron, on viendra &agrave; lui.<br /><br /><strong>Ces derni&egrave;res ann&eacute;es, les violences polici&egrave;res ont d&eacute;bord&eacute; les quartiers populaires o&ugrave; elles sont ancr&eacute;es de longue date. La r&eacute;pression &agrave; l'encontre du mouvement social contre la loi travail l'illustre bien. Au-del&agrave; des diff&eacute;rences, quel est selon vous le rapport entre les violences polici&egrave;res &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre dans les quartiers populaires et celles qui ont davantage touch&eacute; les classes moyennes&nbsp;?</strong> <br /><br />Il n'y a pas de diff&eacute;rence. La seule diff&eacute;rence qui existe, c'est que dans les quartiers populaires, &ccedil;a fait plus de trente ans que &ccedil;a existe. C'est &ccedil;a la diff&eacute;rence. Les violences, elles, sont les m&ecirc;mes. Elles sont diff&eacute;rentes aussi parce que les gens des classes moyennes ne se feront pas tuer. Il y aura beaucoup plus de bless&eacute;s. Malheureusement R&eacute;mi Fraisse en est mort mais les nombreux tu&eacute;s dans les quartiers populaires restent des enfants d'immigr&eacute;s, des Noirs, des Arabes, ceux qui n'ont pas la bonne religion ou ceux qui n'ont pas la bonne couleur et ce, depuis des d&eacute;cennies, depuis plus de quarante ans maintenant. Quand on arrive sur les violences li&eacute;es &agrave; la loi travail, malheureusement, on ne se rend compte que maintenant que ces m&ecirc;mes violences sont subies elles aussi dans les quartiers populaires depuis d&eacute;j&agrave; tr&egrave;s longtemps. Apr&egrave;s, ce qui est int&eacute;ressant, c'est que c'est un combat que l'on va porter ensemble, c'est &ccedil;a qui est fort. C'est un combat que l'on doit et que l'on va porter ensemble, m&ecirc;me si il y a un d&eacute;calage dans le temps entre les violences subies. Nous, le combat d'Adama Traor&eacute;, on veut que ce soit un combat rassembleur parce que la France divise son peuple et quand un peuple est divis&eacute;, c'est plus facile d'attaquer une partie de la population. Mais quand on se l&egrave;ve ensemble pour renverser cette mauvaise France, on est plus fort.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><img src="images/pict/art-459-3.jpg" alt="" /></p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><strong>Le samedi 17 mars, le comit&eacute; V&eacute;rit&eacute; et Justice pour Adama a particip&eacute; &agrave; la &laquo;&nbsp;marche des solidarit&eacute;s&nbsp;&raquo; au c&ocirc;t&eacute; notamment d'autres collectifs de familles victimes de violences polici&egrave;res, ce qui n'avait pas &eacute;t&eacute; le cas l'an dernier. Est-ce le signe d'un d&eacute;but de &laquo;&nbsp;convergence des luttes&nbsp;&raquo;&nbsp;?</strong><br /><br />On a toujours converg&eacute;, toujours. Le comit&eacute; Adama est dans la convergence. On se d&eacute;place sur toutes les luttes. Si l'an dernier on n'y &eacute;tait pas all&eacute;s, c'est pour d'autres raisons qui respectaient nos convictions, nos principes et nos valeurs. <br /><br /><strong>Une id&eacute;e forte du livre &laquo;&nbsp;Lettre &agrave; Adama&nbsp;&raquo; est quand vous affirmez que les jeunes issus des quartiers populaires, ceux que l'on d&eacute;signe comme &laquo;&nbsp;issus de l'immigration&nbsp;&raquo;, veulent pleinement participer &agrave; la construction de la France, mais en sont exclus. Quelles formes prend cette exclusion au quotidien&nbsp;?</strong><br /><br />Par des meurtres et de la violence, parce qu'aujourd'hui quand on vient tuer le 19 juillet 2016, on ne vient pas tuer Adama Traor&eacute; parce qu'il y aurait une &laquo;&nbsp;liste&nbsp;&raquo;, on vient tuer des Adama Traor&eacute;. Mon fr&egrave;re est mort &agrave; cause d'un syst&egrave;me, un syst&egrave;me qui depuis des d&eacute;cennies pointe le doigt sur ces jeunes d&egrave;s leur scolarit&eacute;, leur orientation professionnelle et ce, dans les quartiers. Pour les policiers et les gendarmes qui viennent dans les quartiers, ces jeunes sont d&eacute;shumanis&eacute;s &agrave; leurs yeux. Ils ne les voient pas comme des humains. On les traite, on leur crache dessus, on les frappe ou on les tue, malheureusement. Mais on ne les voit pas comme des personnes pouvant participer &agrave; la construction de ce monde, participer &agrave; la construction de la France et surtout participer &agrave; la construction de leur vie. C'est ce syst&egrave;me l&agrave; qui vient tuer nos fr&egrave;res sous couvert de l'&Eacute;tat. <br /><br /><strong>Dans le livre, vous &eacute;voquez aussi le r&ocirc;le de l'&eacute;cole qui participe aussi en tant qu'institution d'&Eacute;tat &agrave; cette exclusion&hellip;</strong><br /><br />On pourrait faire un livre sur l'exclusion de tous ces jeunes par l'&eacute;cole. Le doigt reste point&eacute; sur eux et l'&eacute;cole ne va pas faire en sorte de changer cela. On va les marginaliser. On va les stigmatiser. On va les mettre dans une case, dans une orientation qu'ils n'auront m&ecirc;me pas choisie. Ce sont des jeunes qui ne seront pas forc&eacute;ment valoris&eacute;s. Ce sont des jeunes que l'on ne va regarder que d'un seul &oelig;il, alors qu'on pourrait les voir diff&eacute;remment. Ils sont cat&eacute;goris&eacute;s et on les envoie ensuite directement dans ces quartiers parce que quand il y a un &eacute;chec scolaire, quand il y a un rejet de l'&eacute;cole, on les enferme dans une zone g&eacute;ographique qui reste le quartier.<br /><br /><strong>Dans &laquo;&nbsp;Lettre &agrave; Adama&nbsp;&raquo;, vous refusez l'expression de jeunes &laquo;&nbsp;issus de l'immigration&nbsp;&raquo; qui aurait pour effet de masquer l'histoire coloniale de la France. L'emploi de ces termes, est-ce le signe que la France n'a pas v&eacute;ritablement tourn&eacute; la page de la colonisation&nbsp;?</strong><br /><br />La France n'assume m&ecirc;me pas son histoire de l'esclavage. La France a &eacute;t&eacute; piller en Afrique. On a fait des esclaves et des objets sexuels des hommes et des femmes.. On a exerc&eacute; de la violence sur eux mais on n'en parle jamais dans les manuels scolaires. La France a colonis&eacute; plusieurs pays et on n'en parle pas dans les manuels scolaires. On leur a fait subir des viols, de la violence et des violences polici&egrave;res. On n'en parle pas. La France a tu&eacute; en mai 67 en Guadeloupe une importante population noire. On n'en parle pas dans les bouquins. Aujourd'hui, la France est encore dans un &Eacute;tat colonisateur, dans un id&eacute;al colonisateur et tant qu'elle n'aura pas assum&eacute; son histoire, on n'arrivera pas &agrave; avancer. On va pointer les &Eacute;tats-Unis parce qu'on ne peut pas parler de ce qu'il se passe chez soi alors qu'il se passe ici exactement la m&ecirc;me chose. <br /><br /><strong>Dans le livre, vous parlez d' &laquo;&nbsp;ennemis de l'int&eacute;rieur&nbsp;&raquo; au sujet des jeunes hommes &laquo;&nbsp;issus de l'immigration&nbsp;&raquo;&hellip;</strong><br /><br />Eux nuisent. Le jeune gar&ccedil;on &laquo;&nbsp;issu de l'immigration&nbsp;&raquo; va nuire. On va le rejeter. On va le renvoyer. Il ne peut pas participer &agrave; la construction de cette France. La femme exotique, quant &agrave; elle, sera un fantasme pour l'homme blanc. Elle va moins nuire donc le traitement sera diff&eacute;rent.<br /><br /><strong>Vous avez &agrave; de nombreuses reprises d&eacute;clar&eacute; que la France a besoin d'une &laquo;&nbsp;belle r&eacute;volution&nbsp;&raquo;. Quels en seraient les contours&nbsp;?</strong> <br /><br />Bien s&ucirc;r qu'il nous faut une r&eacute;volution. Pourquoi a-t-on peur d'une r&eacute;volution aujourd'hui&nbsp;? Les gens veulent une r&eacute;volution mais ils ont peur. Si nous aujourd&rsquo;hui, nous disposons de tous les droits que nous avons, c'est parce que des personnes se sont battues pour que nous puissions les avoir. Des personnes ont fait des r&eacute;volutions avant nous. Des personnes ont fait en sorte que nous ayons des droits, pour pouvoir avancer, s'exprimer et dire ce que l'on a envie. Pourquoi nous, on ne la ferait pas cette belle r&eacute;volution&nbsp;? Il faut renverser cette &laquo;&nbsp;mauvaise France&nbsp;&raquo;, r&eacute;cup&eacute;rer cette &laquo;&nbsp;bonne France&nbsp;&raquo; et laisser des droits meilleurs pour ceux qui arriveront apr&egrave;s nous.<br /><br /><strong>Quelle est la meilleure mani&egrave;re aujourd'hui de soutenir votre combat pour la v&eacute;rit&eacute; et la justice&nbsp;?</strong><br /><br />Aujourd'hui, il faut relayer l'information le plus possible. Il faut &laquo;&nbsp;liker&nbsp;&raquo; la page Facebook &laquo;&nbsp;<a title="La v&eacute;rit&eacute; pour Adama" href="https://www.facebook.com/La-v%C3%A9rit%C3%A9-pour-Adama-160752057668634/" target="_blank">La v&eacute;rit&eacute; pour Adama</a>&nbsp;&raquo;, aller sur <a title="Twitter" href="https://twitter.com/laveritepradama" target="_blank">Twitter</a> et surtout, il faut nous aider dans le combat financi&egrave;rement parce que l'argent est le nerf de la guerre. Tout est financ&eacute; de l'autre c&ocirc;t&eacute;. Pour les gendarmes, l'&Eacute;tat finance tout. Nous, la mort de mon fr&egrave;re n'&eacute;tait pas pr&eacute;vue. On n'avait pas mis d'argent de c&ocirc;t&eacute; pour le meurtre de mon fr&egrave;re. Nous sommes les victimes et nous devons tout payer. Nous avons mis en place une cagnotte o&ugrave; les gens peuvent faire des dons<sup><strong>4</strong></sup>. Si 1000 personnes nous donnent un euro&hellip; c'est important. Il y a aussi les t-shirts qui sont en vente &agrave; 10 euros et il y a le livre &laquo;&nbsp;Lettre &agrave; Adama&nbsp;&raquo; que vous pouvez trouver dans toutes les librairies ou sur internet. Chaque livre achet&eacute; contribuera aux frais judiciaires.<br /><br />Propos recueillis par Gwenha&euml;l Blorville le 18 mars 2018.</p> <p style="text-align: justify;"><strong>Cr&eacute;dit photo </strong>: &copy; NnoMan - Collectif OEIL.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: medium;"><strong>Publi&eacute; en PARTENARIAT avec </strong></span><span style="font-size: medium;"><strong>R&eacute;volution Permanente</strong></span><span style="font-size: medium;"><strong> :</strong></span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: medium;"><strong> <a href="http://www.revolutionpermanente.fr/">http://www.revolutionpermanente.fr/</a></strong></span></p> <p style="text-align: justify;"><a href="http://www.revolutionpermanente.fr/" target="_blank"><img src="images/pict/art-459-4.jpg" alt="" /></a></p> <p style="text-align: left;"><span style="color: #808080;">___________________________</span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: small;"><strong>Notes</strong></span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: small;">[1] Assa Traor&eacute; (avec Elsa Vigoureux), Lettre &agrave; Adama, &eacute;ditions du Seuil, Paris, 2017, 17 euros.</span></p> <p style="text-align: justify;"><a href="http://www.seuil.com/ouvrage/lettre-a-adama-assa-traore/9782021368994" target="_blank"><img src="images/pict/art-459-5.jpg" alt="" /></a></p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;<span style="font-size: small;">[2] Bagui Traor&eacute; &eacute;tait accus&eacute; d'avoir mim&eacute; des pistolets avec ses mains envers des gendarmes. Le fr&egrave;re d'Adama, qui affirmait avoir simplement effectu&eacute; le signe caract&eacute;ristique du rappeur Jul, a &eacute;t&eacute; relax&eacute; le 23 f&eacute;vrier dernier par le tribunal de Pontoise.</span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: small;">[3] Pouria Amirshahi a &eacute;t&eacute; d&eacute;put&eacute;, sous l'&eacute;tiquette du Parti socialiste, de juin 2012 &agrave; juin 2017. Il a depuis quitt&eacute; le Parti socialiste.</span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="font-size: small;">[4] La cagnotte de soutien au comit&eacute; V&eacute;rit&eacute; et Justice pour Adama est accessible ici&nbsp;: <a href="https://www.okpal.com/adama-traore">https://www.okpal.com/adama-traore</a></span></p> <p style="text-align: justify;"><a href="https://www.okpal.com/adama-traore" target="_blank"><span style="font-size: small;"><img src="images/pict/art-459-6.jpg" alt="" /></span></a></p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> Mon, 26 Mar 2018 22:45:04 GMT+2